Paroisse Sainte Marie de Magdala

Homélie du Père Pierre (Colombani) - Fête de la PENTECOTE 8 juin 2014


Actes. 2,  1 - 11

Corinthiens 12,  3b - 7. 12 - 13

Jean 20,  19 - 23

 

 

Mes amis, en cette fête de la Pentecôte, un mot doit résonner en nos êtres et dans nos cœurs, ce matin, c’est le mot de la joie.

Je sais que je peux vous apparaître, en disant cela, quelque peu utopiste, dans le sens où nous sommes dans  un monde bouleversé, traversé par tellement de fléaux, et pourtant ce matin, oui, j’ose le dire, nous sommes invités à la joie, la joie  de Pentecôte qui se décline  de façon très particulière.

D’abord, nous avons cet Evangile de St Jean qui nous ramène au temps de la Résurrection, c’est-à- dire que nous sommes cinquante jours avant la Pentecôte. Que se passe-t-il au moment de la Résurrection ? Les Apôtres sont dans la peur, dans l’idée que tout ce qu’ils ont vécu a finalement abouti à un grand échec, puisque leur Seigneur est mort. Certes, ils l’ont plus ou moins vu ressuscité, des femmes sont venu dire qu’elles l’avaient vu vivant. Pierre et Jean sont allés au tombeau. Il y a eu aussi les disciples d’Emmaüs. Mais ils sont tellement bouleversés, tellement humains, tellement dans cette peur, pétris dans la peur de cette finitude, qu’ils se disent qu’ils étaient dans une illusion, dans un grand rêve. Ils sont là enfermés, enfermés dans leur chambre, enfermés dans leur humanité, enfermés dans ce qui leur apparaît comme impossible. Et tout à coup le Seigneur apparaît et dans cette apparition, il vient briser toutes les portes, comme il avait brisé cette pierre roulée du tombeau. Et là, ils leur dit : " la paix soit avec vous." Au moment où il prononce ce mot de la paix, ils sont dans la joie. Et ils vont recevoir le Souffle, l’Esprit.

Pentecôte, c’est donc d’abord de nous ressaisir, de sortir de toutes nos torpeurs, de toutes nos frayeurs, de toutes nos angoisses, de nos états anxiogènes pour aller vers cet éblouissement.  Oui, Seigneur tu es ressuscité ! Oui tu es vivant ! et avec Toi, nous allons marcher.

Voici que ce temps de Pentecôte, c’est d’abord cette rencontre qui nous fait dire que nous ne sommes pas seuls, mais que nous sommes accompagnés.

Le deuxième texte, tiré des Actes des Apôtres, nous présente, dans la chambre haute, ses amis qui sont rassemblés et qui, tout à coup, sont saisis par l’Esprit Saint. Qu’est-ce que cela veut dire ? Nous ne sommes pas dans une mythologie, nous ne sommes pas dans une présentation plus ou moins imaginative, nous sommes dans la réalité même de notre foi. Ce Dieu, qui s’est incarné en la personne de Jésus, ne peut pas nous abandonner. Et ne nous abandonnant pas, il n’est pas là à nous dire : entre votre naissance et votre mort, vous devrez me chercher et m’espérer. Pas du tout. Depuis qu’il a vécu en son Fils, l’Incarnation, qu’il est passé par la souffrance et par la mort et qu'Il est ressuscité, Il veut nous faire vivre la communion à Lui, en Lui.

Quelle est la plus grande communion, si ce n’est d’accueillir sa présence ?

Ainsi, le jour de Pentecôte, c’est véritablement cette rencontre entre l’Humain et le Divin. Ce qu’était la personne de Jésus en tant que Christ, vrai Dieu et vrai Homme, voici que, désormais, cela nous est proposé et que, par ce souffle de la Résurrection, nous sommes devenus capables d’habiter l’humain et le divin ensemble, et que nos humanités sont faites pour devenir réceptacles de ce souffle de vie. On n’est plus dans l’imagination des religions, dans l’évocation des divinités, on est dans cette affirmation de Dieu en l’Homme et de l’Homme en Dieu. Par conséquent, au moment où c’est la descente sur les Apôtres, en réalité, c’est véritablement l’embrasement de toute l’humanité dans toutes ses déclinaisons, qui se fait.

Oui, on nous décline des diverses nationalités qui se trouveraient présentes et qui tout à coup entendent, dans leur langue, la Bonne Nouvelle. Mais cela veut dire que dans nos humanités intérieures d’abord, nous sommes saisis à tous les niveaux, et qu‘il n’y a pas le mental, l’intellect, l’affectif, l’émotionnel, le spirituel, le corporel, non tout est saisi, tout est de Dieu, tout est en Dieu, tout est pour Dieu. C’est cette catholicité intérieure que nous allons pouvoir dire et ainsi cet embrasement de toutes les nations c’est d’abord l’embrasement en nous-mêmes. Par cet embrasement, nous pouvons entendre que l’autre, quel qu’il soit, quelle que soit sa croyance, quel que soit ce qu’il est profondément, socialement, intellectuellement, spirituellement, historiquement, celui-là aussi est habité de Dieu comme chacun d’entre nous.

Esprit Saint, Esprit consolateur, voici que nous reconnaissons que l’homme, quel qu’il soit, est capable de vivre cette réalité, Dieu-Homme, Homme-Dieu, il n’y a plus de séparation, mais il y a fondamentalement cette relation, cette communion.

Et nous arrivons à ce texte formidable, la première épître aux Corinthiens. St Paul nous dit que quelle que soit notre identité, quel que soit notre charisme, nous sommes tous habités de ce même Esprit Saint. L’Eglise est là en train de naître

En priant, ce matin, pour le pape François qui rassemble les Juifs et les Palestiniens, nous prions pour toute l’humanité, capable de se séparer, et nous prions pour l’Eglise qui est capable de rassembler. Ainsi la fête de Pentecôte, c’est non seulement l’Homme en Dieu et Dieu en l’Homme, mais tout à coup c’est aussi la fête de la mission des chrétiens, la mission de l’Eglise, la mission qui nous incombe. Le Christ ressuscité a rassemblé ses amis, les a fait revenir de leur peur pour les mettre dans la joie.

Désormais cette joie d’être habité et de Dieu et de l’Homme, il nous faut la propager autour de nous.

Alors, déployons nos charismes, qui que nous soyons, quels que soient nos talents, ils ne nous appartiennent pas, ils sont  de l’inspiration, et nous sommes envoyés pour dire à notre frère, à notre sœur : " sois dans la joie," rien ne peut te limiter, pas même la souffrance, pas même la mort.  Donc aucun échec, tout est ouvert. Sois dans la joie de cette Pentecôte, et que cette joie fasse de toi, un être nouveau.

Désormais, mes amis, nous sommes investis de cette mission, mission de l’Eglise que nous sommes, car l’Eglise, ce n’est pas un bâtiment, l’Eglise ce n’est pas un parchemin de dogmes, l’Eglise ce sont nos humanités embrasées qui vont propager autour la Bonne Nouvelle. Pourrions-nous être Eglise, si nous n’étions pas innervés du sacrement  de l’Eucharistie, du sacrement de réconciliation, c’est-à-dire de cette manifestation  du Christ en chacun de nous.

Ce matin, avec vous, dans cette joie de Pentecôte, je veux prier pour l’Eglise, non pas l’Eglise ici, là ou ailleurs, mais l’Eglise du Christ et que cette Eglise, nous en soyons un élément positif, un élément fervent, une élément véritablement fécond.

Puisque nous avons choisi notre petite Eglise orthodoxe française avec ses défauts, avec ses limites, dans cette Eglise-là, faisons vivre toute l’Eglise, faisons respirer toute l’Eglise. Et comme il y avait les Grecs, comme il y avait les Juifs, comme il y avait les Parthes, etc, soyons, dans notre propre identité, capables d’insuffler dans la Grande Eglise, cette beauté d’être en Dieu, par nos humanités.

 

Ce matin  Esprit  je te prie, je t’appelle et je t’invoque sur chacun des membres de cette assemblée,  je t’appelle et je t’invoque sur chacune de nos histoires,  je t’appelle et je t’invoque sur nos maladies, sur nos souffrances, sur nos échecs,  je t’appelle et je t’invoque et je te prie pour que tu fasses de nous une communauté aimante, véritable, rassemblée, communionnelle, qui manifeste, dans la communion de la Sainte Trinité cette puissance de la vie en toi.      Amen.