Paroisse Sainte Marie de Magdala

Homélie du Père Pierre (Colombani) - dimanche 8 septembre 2013

 Fête de la nativité de la Vierge Marie, Mère de Dieu


Cantique des Cantiques 8, 4 à 7

Hébreux 11 , 11 à 16

Matthieu 7, 7 à 27


Marie, Mère de Dieu. Nous fêtons ce matin, nous célébrons ce matin ta naissance. La nativité de la Vierge, mes amis, est plus qu’une fête, est plus qu’un anniversaire. La nativité de la Vierge Marie vient nous inscrire au cœur même du mystère chrétien. En effet, les Pères de l’Église ont longuement cherché, médité, pour arriver à entendre dans l’Esprit Saint ce qui était la manifestation la plus difficile à percevoir pour l’Homme. Au point qu’aujourd’hui encore, beaucoup rejettent cette grande révélation.

Et dernièrement je lisais un roman d’un certain Dos Santos, qui, sous prétexte de revenir sur les origines du Christianisme, remettait en cause les fondements de notre foi parce qu’il y aurait eu ce temps. Ce temps de méditation, ce temps d’inscription, pour comprendre toute la portée de la Révélation, et que tout ne serait pas dit dans les Écritures. Bien sûr, tout n’est pas dit dans les Écritures. Car nous ne sommes pas la religion du livre, nous sommes la religion de la Personne.

Donc près de quatre siècles ont dû se dérouler pour que les Pères entendent, en profondeur, ce qu’était le grand mystère de la double nature du Christ, vrai Dieu et vrai Homme. Et Marie, la Théotokos, est celle qui est vraiment pour nous essentielle, parce qu’elle est de notre condition. Elle n’est pas divine, elle est toute humaine. Elle est pleinement humaine. Et dans son humanité, elle va être capable de porter le Verbe de Dieu. Elle va être capable de donner naissance à la manifestation divine. Qui, bien sûr, va prendre toute la condition de l’Homme, mais tout en étant un Homme, sera Dieu. Alors que nous, nous ne sommes pas des dieux. Nous sommes des hommes appelés à nous diviniser. En cela, Marie est essentielle, car elle, toute humaine, va être capable de donner naissance au divin.

La nativité de la Vierge Marie, mes amis, est donc essentielle, car elle inaugure cette nouvelle humanité, cette nouvelle anthropologie. Nous ne sommes pas simplement appelés à dire « je crois », mais nous sommes appelés à être ce que nous croyons. Et l’Évangile de ce matin, de saint Matthieu, nous rapporte ces propos de Jésus où il nous dit : il ne suffit pas de dire Seigneur, Seigneur, pour être de mon Royaume ; encore faut-il faire la volonté du Père. C’est exactement ce que va faire Marie. Et dans les textes que nous avons entendus, il y a deux déclinaisons essentielles. D’abord il y a ce passage du Cantique des Cantiques, qui nous rappelle que l’amour est ce par quoi nous pouvons avoir accès à la dimension indestructible en nous. Oui, humains, nous sommes appelés à nous diviniser. Alors nous pourrions nous dire : nous sommes prêts à nous diviniser, mais comment, concrètement ?

Et là, la Révélation nous répond : en aimant, en vivant l’amour. Et l’amour, cela porte un nom : l’amour, c’est le don de soi absolu. Marie s’est totalement donnée. Elle savait qu’en disant oui, elle allait être victime de la vindicte publique. En disant oui, elle allait être traînée dans la boue. Et quand bien même elle ne l’a pas été parce que Joseph la protégeait, elle va vivre un calvaire. Le calvaire de vivre dans l’ombre, le calvaire d’accompagner ce fils qui sera conduit jusque sur la croix. Et rester debout en disant : celui-ci est mon fils, écoutez-le ! Comme elle l’avait dit à Cana.

Oui, ce Cantique des Cantiques nous décline cette première harmonique essentielle pour vivre la volonté du Père, nous devons aimer, nous devons être donnés. Donner de nous-mêmes. Donner de nous-mêmes, mes amis, ce n’est pas simplement donner son manteau, donner son argent, donner son avoir. C’est donner sa personne, se donner, être donné. « Si tu savais le don de Dieu », dira Jésus dans l’Évangile de Jean. « Si tu savais le don de Dieu ». Dieu est Amour parce qu’Il se donne à nous. Nous ne pouvons nous déifier, nous ne pouvons nous diviniser que si nous sommes donnés. Et Marie va être la Mère de Dieu, la Théotokos, parce qu’elle se donne, parce qu’elle ne résiste pas.

Et puis il y a ce deuxième texte, l’épître aux Hébreux, qui évoque Sara, celle qui avait ri. Sara, dans son rire, qui pouvait manifester un doute. Mais malgré ce rire, malgré ce doute, elle va être la femme de la foi. Et comme le dit l’auteur de l’épître aux Hébreux : parce qu’elle a cru, voici que sa descendance a été aussi nombreuse que les étoiles du ciel, que les grains de sable dans le désert. Oui, là nous touchons à la deuxième harmonique, à cette deuxième déclinaison pour vivre la volonté du Père, non seulement nous devons aimer, mais nous devons vivre la foi.

Avoir la foi, mes amis, c’est avoir confiance. Avoir la foi, c’est non seulement se donner dans l’amour, mais c’est se donner dans l’espérance. S’abandonner, se donner sans compter parce que l’on sait que quoiqu’il advienne, nous sommes sauvés. Que quoiqu’il advienne, nous sommes appelés. Que quoiqu’il advienne, nous sommes convoqués.

Et ces deux chemins là ont caractérisé Marie, Mère de Dieu. Elle est la Mère de Dieu, elle est la mère de l’Église, parce qu’elle dit « oui ». Et dans son « oui », elle crie sa foi, et dans son « oui » elle crie l’amour et elle se donne pleinement. La naissance de Marie, c’est donc, au-delà de la symbolique, au-delà de la mythologie, la naissance de Marie, c’est la naissance de l’Église. C’est la naissance de tous ceux qui sont appelés après le Christ, avec le Christ, dans le Christ, à dire ce « oui » à Dieu et à se donner pleinement, sans compter.

Ainsi, cette naissance de Marie vient comme nous innerver, nous régénérer, et nous poser la question : te laisses-tu saisir par ce Seigneur qui t’habite, ou restes-tu encore étranger, étranger à cette habitation, et mets-tu ce Seigneur à la périphérie de ta vie ? Où te situes-tu ? Où es-tu, toi, l’Adama, toi le tiré de la terre ? Toi, resteras-tu simplement l’Homme de l’apparence, l’Homme du temporaire, ou deviendras-tu l’Homme de l’éternité qui se place dans la vérité ? Il n’y a pas de vérité sans amour, il n’y a pas de vérité sans confiance.

Père Saint, je te loue, et je te rends grâce de ce que tu nous aies montré le chemin en Marie. Avec elle, nous nous réjouissons, et nous chantons ta gloire. Amen.