Paroisse Sainte Marie de Magdala

Homélie du Père Pierre (Colombani) - dimanche 23 février 2014 


Jérémie 12, 10 - 13a

Galates 5, 13 - 6, 2

Luc 8, 4 - 15


         De quoi nous parle le Seigneur en comparant le grain de blé tombé en terre à la Parole ?

Il nous parle de ce message concernant le Christ ressuscité et si nous avons à porter une parole, c’est vraiment celle concernant ce mystère de la mort et de la résurrection. Ce matin, en priant pour Jacquie, nous savons que nous sommes face à ce mystère qui nous fait croire et affirmer que Jacquie, comme tous ceux que nous pleurons parce que nous en sommes séparés, nous en sommes séparés dans l’apparence, dans le toucher, dans ce rapport physique, mais nous n’en sommes pas séparés pour autant, car au-delà de ce voile que nous appelons la mort, ils sont présents dans cette présence que St Paul qualifiait de corps spirituel. Mais que faisons nous de cette parole que nous portons comme une conviction profonde, comme une espérance ?

         C’est la question qui nous est posée ce matin, cette parole est-elle tombée en nous dans la bonne terre ?    Dire cela, se questionner ainsi, cela ne signifie pas simplement que nous aurions parfois, ceux qui seraient dans la bonne terre et ceux qui ne le seraient pas. Mais nous avons des agissements qui montrent que parfois nous sommes de la terre de Dieu et que parfois, nous sommes de la terre, non pas de l’homme, mais de l’homme sans Dieu.

         Ainsi, St Paul va mettre en opposition la chair et l’esprit. Entendons bien que la chair, ce n’est pas simplement tout ce qui relèverait de la corporéité sexuelle, ce serait trop facile et malheureusement les religions se sont engouffrées là dedans pour toujours condamner la sexualité, la corporéité. Lorsque Paul nous parle de la chair, il nous parle de l’esprit du monde sans Dieu.Autrement dit, un monde qui oublie qu’il est ordonné, qu’il est orienté, finalisé par rapport à Dieu.  Mais dire cela veut dire que nous avons toujours à trouver un sens, quoi que nous fassions, dans la vie conjugale, familiale, associative, dans la vie de la cité, dans nos professions, dans tout ce que nous engageons, avons-nous conscience que tout a un sens, que nous allons vers une finalité, vers une réalisation. Or ce monde nous l’oublion, et nous vivons petitement, à court terme, et quand St Paul revient sur cette déclinaison de toute forme de péché, ce n’est pas pour nous faire entrer dans une culpabilité, mais tout ce qui va être de l’ordre de la jalousie, de la discrimination, tout ce qu’il décrit, c’est finalement ces processus où nous sommes tellement engoncés en nous-mêmes, que nous oublions l’essentiel et que notre vie, sur le plan économique, politique, religieux, toute notre vie finalement est complètement détournée. Lorsque le Seigneur nous dit ; où est tombée la Parole ? – est-elle tombée dans la bonne terre ? Il y a des moments où nous sommes dans cette amnésie, oui la Parole n’est pas enracinée, la Parole ne produit pas du fruit, la Parole ne permet pas véritablement le déploiement de la fécondité. La fécondité divine, c’est cette capacité à pouvoir toujours croire en l’autre, dans la relation quelle qu’en soit la nature, croire en l’autre, pas par générosité, mais parce que si le Christ est ressuscité, cela veut dire que nous devons aimer à temps et à contre temps. Aimer, ce n’est pas simplement "je t’aime", de manière émotionnelle, mais, je te convoque à nouveau, autrement parce qu’il y a en toi une possibilité de pouvoir réaliser différemment ton histoire, parce que tu as été marqué de ce sceau de Dieu qui fait que tu n’es pas simplement cet humain qui se cherche, mais tu es le fils d’un Autre,  le fils du Très-Haut,  le fils de Celui qui te rend digne,  qui te rend grand. Voilà quelle est notre foi, tel est le coeur de la Parole.    Et c’est cette Parole qu’il faut propager.

 

         En prononçant ces mots, je pense à ces hommes et à ces femmes qui sont morts jeudi sur la place de Kiev parce qu’ils défendaient une certaine idée de la liberté. Au-delà des aspects politiques, ces hommes et ces femmes, en se levant, voulaient croire en la liberté. Mais cette notion de la liberté, ce n’est pas simplement un rêve humain, mais c’est quelque chose qui est inscrit en nous depuis la nuit des temps et qui vient de ce Dieu qui nous dit que nous sommes faits pour pouvoir déployer le meilleur de nous-mêmes. Quand l’homme se met à chercher à être dans cette liberté, eh bien il répond à l’aspiration divine.

         Mais cette notion de liberté, n’est pas que dans le sens politique, elle est dans tous les sens. Comment sommes nous libres pour aimer le conjoint, l’enfant, le parent ; comment sommes-nous libres pour nous aimer au quotidien ? La parole de Dieu vient nous interroger par rapport à cela.

         Aussi s’interroger sur la bonne terre ou la mauvaise terre, ce n‘est pas tomber dans une forme d’inquiétude qui nous culpabiliserait, mais c’est réellement nous refixer dans cet axe : suis-je véritablement dans la réponse à l’essentiel dans ma vie ou est ce que je me laisse emporter par des choses secondaires ?

         En priant pour vous, Jacquie ce matin, nous prions avec vous et nous prions pour que vous nous aidiez, de là où vous êtes, à garder ce cap, à garder ce chemin, et que votre époux Hubert,  que vos enfants et petits-enfants soient dans cette joie de pouvoir bâtir leur vie à la lumière de cette Espérance : nous sommes aimés et convoqués par Dieu

Amen